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La montée en puissance de la diplomatie turque en Afrique

La montée en puissance de la diplomatie turque en Afrique. Article écrit par Éric Topona. Publié le 2 septembre 2025à 07h45

⏱ Temps de lecture estimé : 11 minutes

Éric Topona. C’est en Libye que se tiendra en 2026 ​ le​ quatrième Sommet Turquie​-Afrique Cette rencontre entre la Turquie et ses Etats partenaires africains, devenue traditionnelle à l’instar des rencontres similaires entre les puissances les plus en vue et l’Afrique est fort révélatrice. Elle témoigne, s’il en était encore besoin, de l’affirmation grandissante de la Turquie sur la scène géopolitique mondiale, comme une puissance de plus en plus incontournable. Il y’a lieu de relever qu’après le rôle clé que vient de jouer Ankara dans le changement de régime en Syrie, en plus de la position charnière et stratégique qu’​elle occupe  entre le Moyen-Orient et l’Europe, ce pays membre de l’OTAN​ (Organisation du traité de l’Atlantique nord ​) et non des moindres, ne cesse d’étendre en Afrique sa présence, voire son influence multidimensionnelle. À l’instar d’une puissance émergente telle que l’Inde, la Turquie a su mettre à contribution l’espace géopolitique créé par le retrait progressif des pays occidentaux d’Afrique, notamment ceux d’Europe occidentale qui ont jugé plus utile, au lendemain de l’effondrement du communisme soviétique et de la chute du Mur de Berlin​ (survenue dans la nuit du 9 novembre 1989​), de recentrer leurs priorités géostratégiques en direction de l’Europe de l’Est.  ​Une coopération bienvenue pour l’Afrique Pour l’Afrique, cet intérêt de la Turquie pour une coopération mutuellement fructueuse ne pouvait qu’être bienvenu. L’Afrique en tant que terre d’opportunités considérables, un continent dans lequel les immenses potentialités ont besoin de capitaux massifs, de savoirs et de savoir-faire pour faire face à une demande sociale de plus en plus importante en raison de l’explosion démographique dont elle est le théâtre, et d’une jeunesse nombreuse à laquelle il est vital de garantir l’accès à l’essentiel. Le contexte international actuel est un terrain favorable, peut-être plus que par le passé, pour une relation encore plus affirmée entre la Turquie et l’Afrique. Le retour au pouvoir de Donald Trump à la Maison Blanche, ​le 20 janvier 2025 s’est notamment traduite par une crise sans précédent du multilatéralisme depuis la fin de la Guerre froide​ (entre 1989 et 1991​). L’exacerbation des prétentions impériales des États-Unis d’Amérique, ​leur désengagement  de plusieurs institutions internationales importantes pour l’Afrique à l’instar de l’USAID​ (Agence des États-Unis pour le développement international ​), offrent à l’inverse pour les puissances émergentes en cours de déploiement en Afrique, un terrain favorable pour étendre leur influence. Et dans la nouvelle configuration géopolitique qui se met en place, les quatre prochaines années de la présidence de Trump offriront sans doute de nombreuses opportunités en ce sens ; ce d’autant plus que dans un environnement international extrêmement concurrentiel comme c’est le cas actuellement, la nature a plus que par le passé horreur du vide.  ​Défense du multilatéralisme Or, l’Afrique et la Turquie ont en commun un plaidoyer constant pour la défense du multilatéralisme. Cette option est par ailleurs clairement affirmée dans la déclaration commune du troisième sommet Turquie​-Afrique​ (placé sous le thème: « Partenariat renforcé pour le développement commun et la prospérité »​) et qui s’est tenu du 18 au 21 décembre 2023 à Istanbul : « Dans l’environnement mondial actuel qui nous présente des défis de plus en plus difficiles, nous renouvelons notre engagement à travailler ensemble dans une approche mutuelle et coordonnée pour assurer un multilatéralisme efficace et nous nous engageons à œuvrer pour des positions plus convergentes dans des enceintes multilatérales avec une recherche déterminée d’un monde plus pacifique, juste, stable et prospère basé sur les droits de l’homme, la dignité humaine et l’égalité des chances pour tous (..) »​. La Turquie moderne, héritière d’une longue et riche histoire, d’une grandeur séculaire, a dans sa mémoire collective des enseignements qui parlent à l’Afrique.  En effet, dans un continent africain où l’appel à la renaissance a pignon sur rue, remis au goût du jour par certains politiques souvent en mal d’innovation idéologique, de politiciens populistes et démagogues, d’intellectuels souverainistes en quête d’un enracinement ​d​u continent dans un terreau culturel authentiquement africain, l’histoire de la Turquie moderne est riche d’enseignements pour l’Afrique. La Turquie, il ne faut jamais l’oublier, a longtemps été considérée comme « l’homme malade de l’Europe ». Après des moments de grandeur ce qui fut l’ex-empire ottoman​ (fondé par Osman Ier à la fin du XIIIe siècle, s’étendant de l’Europe centrale et du Maghreb à la Mésopotamie et à la mer Caspienne, avec une capitale à Constantinople (Istanbul). L’empire a finalement pris fin en 1922 avec la dissolution du sultanat et la proclamation de la République turque en 1923​), le pays de la Sublime Porte a perdu de son influence et est rentré dans une période de décadence. Il aura fallu le leadership visionnaire d’un homme, ​​Mustafa Kemal Pacha,​ appelé Atatürk​ pour redonner à la Turquie son lustre et sa grandeur d’antan. Mais la renaissance turque ne s’est pas faite par un retour aveugle et sans discernement vers un passé multiséculaire. Dans son ouvrage, ​​Mustapha Kémal ou la Mort d’un empire: Le loup et le léopard ​Jacques Benoist-Méchin cite le leader turc : ​« Rejetez le fez, qui est sur nos têtes comme l’emblème du fanatisme, et adoptons le chapeau, coiffure du monde civilisé ; montrons qu’il n’y a aucune différence de mentalité entre nous et la grande famille des peuples modernes ».  C’est dire que le processus de la renaissance turque a été une synthèse habile et intelligente entre les réalités nationales et les exigences de rupture et d’innovation de la modernité. En ce sens, l’Afrique a beaucoup à apprendre de la Turquie qui a retrouvé sa grandeur perdue.  ​Apport économique, sécuritaire et culturel  Au-delà de ce socle historique et idéologique, le retour actuel de la Turquie dans la cour des grands tient à ce qu’elle apporte et notamment à l’Afrique et ce, au triple plan économique, sécuritaire et culturel. De manière globale, les relations entre la Turquie et l’Afrique n’ont eu de cesse de s’intensifier depuis le début des années 2000. Alors qu​‘Ankara ne comptait que d​ouze représentations diplomatiques en Afrique en 200​2, elle en compte aujourd’hui 4​3. Ce maillage diplomatique du continent africain par ​c​e pays, est tout à fait impressionnant pour s’être opéré dans une période aussi courte.  C’est dans le domaine économique que l’on prend la juste mesure de la densification exceptionnelle de la coopération entre l’Afrique et la Turquie. Une étude récente du Centre Africain d’Etudes Internationales Diplomatiques et Stratégiques en donne la pleine mesure : « Les relations Turco-africaines, qui ont connu une croissance fulgurante ces dernières années, présentent des chiffres et un bilan tout à fait impressionnants (…) Au niveau économique, le volume des échanges commerciaux entre la Turquie et l’Afrique a été quasiment multiplié par cinq entre 2003 et 2021, passant de 5,4 à 25,3 milliard de dollars. Dans la même période, les exportations turques vers l’Afrique ont augmenté de 2 à 15 milliards de dollars, alors que les importations depuis l’Afrique sont passées de 3 à 10 milliards de dollars.»​ D’après ​la presse gouvernementale turque, ​ ​Anadolu Ajansı (AA), plus de 1500 projets sont déjà mis en œuvre par des entrepreneurs turcs en Afrique dont La valeur cumulative de construction réalisées a dépassé les 77 milliards de dollars. Ces chiffres ont été ​confirmés​ fin juin à Abuja​ (au Nigéria) par le ​ministre turc du Commerce, Mehmet Mus, ​devant les Chambres de commerce et d’industrie du Nigéria. L’on note également la multiplication des liaisons aériennes réalisées par la compagnie ​Turkish Airlines entre la capitale économique turque et quasiment toutes les grandes villes africaines. ​(«En 2025, Turkish Airlines dessert 346 destinations dans le monde, dont 62 en Afrique. Elle dessert un total de 130 pays, faisant d’elle la compagnie aérienne desservant le plus grand nombre de pays. Il s’agit désormais de près d’une soixantaine de destinations africaines desservies»​). Par ailleurs, la Turquie n’a de cesse d’étendre sa présence en Afrique dans les domaines de la coopération militaire, et de manière bien plus large au plan sécuritaire. En Libye où se tient le prochain sommet ​Turquie-Afrique, la Turquie est devenue un acteur incontournable dans cette crise comme dans son règlement.  En raison de la nécessité géostratégique d’assurer la sécurisation de ses approvisionnements en gaz en Méditerranée orientale, la Turquie coopère étroitement avec le gouvernement de Tripoli, aussi appelé gouvernement d’unité nationale (GNU),​ dirigé par ​Abdelhamid Dbeibah  et qui bénéficie de la reconnaissance de l’ONU.  L’armée russe est présente en Libye aussi bien en hommes qu’en matériel militaire.  En Afrique orientale, notamment en Somalie, la Turquie a installé une base militaire​ appelée ​TURKSOM. ​I​l s’agit de la plus grande base militaire turque à l’étranger​ et est située près de ​Mogadiscio​ (la plus grande ville et la capitale de la Somalie​). Cette base sert à former des soldats somaliens, notamment pour lutter contre ​les djihadistes d’Al-Shabab​ qui ont longtemps déstabilisé cet État​ . La base​ TURKSOM​ couvre une superficie d​‘environ 4 km² et peut accueillir plus de 1 500 soldats pour leur entraînement. et apporte à cet État son soutien dans sa lutte contre les mouvements de guérilla qui ont longtemps déstabilisé cet État​ fédéral situé à l’extrémité orientale de la Corne de l’Afrique​( est du continent africain). Un autre aspect important de la coopération militaire de la Turquie avec l’Afrique est celui de la vente d’armes. Sur ce point, la Turquie est réputée pour avoir développé une technicité et une compétitivité qui ne peuvent qu’être bénéfiques au continent africain où les défis et les enjeux sécuritaires sont considérables.  Qu’il s’agisse du terrorisme islamiste qui ne cesse de gagner du terrain et de nombreuses autres menaces auxquelles sont confrontés des Etats sur un continent où l’industrie de l’armement est quasi inexistante. C’est une tendance que confirme une étude récente de l​’Observatoire de la Turquie et de son environnement géopolitique de l’Institut des Relations Internationales et Stratégiques​ (IRIS) : « En plus, pour la Turquie qui a l’ambition de s’affirmer sur le marché mondial des ventes d’armes, notamment par ses drones qui se sont imposés lors des guerres au Haut-Karabakh, en Ukraine, en Libye et en Syrie, le continent africain se présente comme une opportunité pour exporter son savoir-faire militaire. De nombreux pays africains achètent en effet du matériel de défense turc. Du point de vue africain, les armes turques sont bon marché et permettent de réduire leur dépendance par rapport aux puissances occidentales qui sont économiquement et politiquement plus exigeantes ». Autre atout de la Turquie dans cette coopération militaire avec l’Afrique, c’est qu’elle n’est regardante ni sur l’usage que feront les gouvernements de ces armes, ni sur les droits humains. Enfin​, ​la Turquie, comme toute puissance aux horizons toujours plus vastes, a joint à son arc diplomatique une dimension du soft power, notamment dans les domaines de l’éducation, de la formation dans des métiers de pointe en médecine ou divers types d’ingénierie, tout comme dans le domaine religieux. La coopération entre l’Afrique et la Turquie est incontestablement sur une dynamique ascendante dont les perspectives demeurent prometteuses.​ Du moins, c’est ce que croient la plupart des pays du continent et leur partenaire turc dans un dynamique d’un partenariat gagnant-gagnant.    .

⏱ Temps de lecture estimé : 11 minutes

Éric Topona

C’est en Libye que se tiendra en 2026  le quatrième Sommet Turquie-Afrique

Cette rencontre entre la Turquie et ses Etats partenaires africains, devenue traditionnelle à l’instar des rencontres similaires entre les puissances les plus en vue et l’Afrique est fort révélatrice. Elle témoigne, s’il en était encore besoin, de l’affirmation grandissante de la Turquie sur la scène géopolitique mondiale, comme une puissance de plus en plus incontournable. Il y’a lieu de relever qu’après le rôle clé que vient de jouer Ankara dans le changement de régime en Syrie, en plus de la position charnière et stratégique qu’elle occupe  entre le Moyen-Orient et l’Europe, ce pays membre de l’OTAN (Organisation du traité de l’Atlantique nord ) et non des moindres, ne cesse d’étendre en Afrique sa présence, voire son influence multidimensionnelle.

À l’instar d’une puissance émergente telle que l’Inde, la Turquie a su mettre à contribution l’espace géopolitique créé par le retrait progressif des pays occidentaux d’Afrique, notamment ceux d’Europe occidentale qui ont jugé plus utile, au lendemain de l’effondrement du communisme soviétique et de la chute du Mur de Berlin (survenue dans la nuit du 9 novembre 1989), de recentrer leurs priorités géostratégiques en direction de l’Europe de l’Est. 

Une coopération bienvenue pour l’Afrique

Pour l’Afrique, cet intérêt de la Turquie pour une coopération mutuellement fructueuse ne pouvait qu’être bienvenu. L’Afrique en tant que terre d’opportunités considérables, un continent dans lequel les immenses potentialités ont besoin de capitaux massifs, de savoirs et de savoir-faire pour faire face à une demande sociale de plus en plus importante en raison de l’explosion démographique dont elle est le théâtre, et d’une jeunesse nombreuse à laquelle il est vital de garantir l’accès à l’essentiel.

Le contexte international actuel est un terrain favorable, peut-être plus que par le passé, pour une relation encore plus affirmée entre la Turquie et l’Afrique. Le retour au pouvoir de Donald Trump à la Maison Blanche, le 20 janvier 2025 s’est notamment traduite par une crise sans précédent du multilatéralisme depuis la fin de la Guerre froide (entre 1989 et 1991).

L’exacerbation des prétentions impériales des États-Unis d’Amérique, leur désengagement  de plusieurs institutions internationales importantes pour l’Afrique à l’instar de l’USAID (Agence des États-Unis pour le développement international ), offrent à l’inverse pour les puissances émergentes en cours de déploiement en Afrique, un terrain favorable pour étendre leur influence. Et dans la nouvelle configuration géopolitique qui se met en place, les quatre prochaines années de la présidence de Trump offriront sans doute de nombreuses opportunités en ce sens ; ce d’autant plus que dans un environnement international extrêmement concurrentiel comme c’est le cas actuellement, la nature a plus que par le passé horreur du vide.

 Défense du multilatéralisme

Or, l’Afrique et la Turquie ont en commun un plaidoyer constant pour la défense du multilatéralisme. Cette option est par ailleurs clairement affirmée dans la déclaration commune du troisième sommet Turquie-Afrique (placé sous le thème: « Partenariat renforcé pour le développement commun et la prospérité ») et qui s’est tenu du 18 au 21 décembre 2023 à Istanbul : « Dans l’environnement mondial actuel qui nous présente des défis de plus en plus difficiles, nous renouvelons notre engagement à travailler ensemble dans une approche mutuelle et coordonnée pour assurer un multilatéralisme efficace et nous nous engageons à œuvrer pour des positions plus convergentes dans des enceintes multilatérales avec une recherche déterminée d’un monde plus pacifique, juste, stable et prospère basé sur les droits de l’homme, la dignité humaine et l’égalité des chances pour tous (..) ».

La Turquie moderne, héritière d’une longue et riche histoire, d’une grandeur séculaire, a dans sa mémoire collective des enseignements qui parlent à l’Afrique. 

En effet, dans un continent africain où l’appel à la renaissance a pignon sur rue, remis au goût du jour par certains politiques souvent en mal d’innovation idéologique, de politiciens populistes et démagogues, d’intellectuels souverainistes en quête d’un enracinement du continent dans un terreau culturel authentiquement africain, l’histoire de la Turquie moderne est riche d’enseignements pour l’Afrique.

La Turquie, il ne faut jamais l’oublier, a longtemps été considérée comme « l’homme malade de l’Europe ». Après des moments de grandeur ce qui fut l’ex-empire ottoman (fondé par Osman Ier à la fin du XIIIe siècle, s’étendant de l’Europe centrale et du Maghreb à la Mésopotamie et à la mer Caspienne, avec une capitale à Constantinople (Istanbul). L’empire a finalement pris fin en 1922 avec la dissolution du sultanat et la proclamation de la République turque en 1923), le pays de la Sublime Porte a perdu de son influence et est rentré dans une période de décadence. Il aura fallu le leadership visionnaire d’un homme, ​​Mustafa Kemal Pacha, appelé Atatürk pour redonner à la Turquie son lustre et sa grandeur d’antan.

Mais la renaissance turque ne s’est pas faite par un retour aveugle et sans discernement vers un passé multiséculaire. Dans son ouvrage, ​​Mustapha Kémal ou la Mort d’un empire: Le loup et le léopard

Jacques Benoist-Méchin cite le leader turc : « Rejetez le fez, qui est sur nos têtes comme l’emblème du fanatisme, et adoptons le chapeau, coiffure du monde civilisé ; montrons qu’il n’y a aucune différence de mentalité entre nous et la grande famille des peuples modernes ».  C’est dire que le processus de la renaissance turque a été une synthèse habile et intelligente entre les réalités nationales et les exigences de rupture et d’innovation de la modernité. En ce sens, l’Afrique a beaucoup à apprendre de la Turquie qui a retrouvé sa grandeur perdue.

 Apport économique, sécuritaire et culturel

 Au-delà de ce socle historique et idéologique, le retour actuel de la Turquie dans la cour des grands tient à ce qu’elle apporte et notamment à l’Afrique et ce, au triple plan économique, sécuritaire et culturel.

De manière globale, les relations entre la Turquie et l’Afrique n’ont eu de cesse de s’intensifier depuis le début des années 2000. Alors qu‘Ankara ne comptait que douze représentations diplomatiques en Afrique en 2002, elle en compte aujourd’hui 43. Ce maillage diplomatique du continent africain par ce pays, est tout à fait impressionnant pour s’être opéré dans une période aussi courte. 

C’est dans le domaine économique que l’on prend la juste mesure de la densification exceptionnelle de la coopération entre l’Afrique et la Turquie.

Une étude récente du Centre Africain d’Etudes Internationales Diplomatiques et Stratégiques en donne la pleine mesure : « Les relations Turco-africaines, qui ont connu une croissance fulgurante ces dernières années, présentent des chiffres et un bilan tout à fait impressionnants (…) Au niveau économique, le volume des échanges commerciaux entre la Turquie et l’Afrique a été quasiment multiplié par cinq entre 2003 et 2021, passant de 5,4 à 25,3 milliard de dollars. Dans la même période, les exportations turques vers l’Afrique ont augmenté de 2 à 15 milliards de dollars, alors que les importations depuis l’Afrique sont passées de 3 à 10 milliards de dollars.»

D’après la presse gouvernementale turque,  Anadolu Ajansı (AA), plus de 1500 projets sont déjà mis en œuvre par des entrepreneurs turcs en Afrique dont La valeur cumulative de construction réalisées a dépassé les 77 milliards de dollars. Ces chiffres ont été confirmés fin juin à Abuja (au Nigéria) par le ministre turc du Commerce, Mehmet Mus, devant les Chambres de commerce et d’industrie du Nigéria.

L’on note également la multiplication des liaisons aériennes réalisées par la compagnie Turkish Airlines entre la capitale économique turque et quasiment toutes les grandes villes africaines. («En 2025, Turkish Airlines dessert 346 destinations dans le monde, dont 62 en Afrique. Elle dessert un total de 130 pays, faisant d’elle la compagnie aérienne desservant le plus grand nombre de pays. Il s’agit désormais de près d’une soixantaine de destinations africaines desservies»).

Par ailleurs, la Turquie n’a de cesse d’étendre sa présence en Afrique dans les domaines de la coopération militaire, et de manière bien plus large au plan sécuritaire. En Libye où se tient le prochain sommet Turquie-Afrique, la Turquie est devenue un acteur incontournable dans cette crise comme dans son règlement. 

En raison de la nécessité géostratégique d’assurer la sécurisation de ses approvisionnements en gaz en Méditerranée orientale, la Turquie coopère étroitement avec le gouvernement de Tripoli, aussi appelé gouvernement d’unité nationale (GNU), dirigé par Abdelhamid Dbeibah  et qui bénéficie de la reconnaissance de l’ONU. 

L’armée russe est présente en Libye aussi bien en hommes qu’en matériel militaire. 

En Afrique orientale, notamment en Somalie, la Turquie a installé une base militaire appelée TURKSOM. Il s’agit de la plus grande base militaire turque à l’étranger et est située près de Mogadiscio (la plus grande ville et la capitale de la Somalie). Cette base sert à former des soldats somaliens, notamment pour lutter contre les djihadistes d’Al-Shabab qui ont longtemps déstabilisé cet État .

La base TURKSOM couvre une superficie d‘environ 4 km² et peut accueillir plus de 1 500 soldats pour leur entraînement. et apporte à cet État son soutien dans sa lutte contre les mouvements de guérilla qui ont longtemps déstabilisé cet État fédéral situé à l’extrémité orientale de la Corne de l’Afrique( est du continent africain).

Un autre aspect important de la coopération militaire de la Turquie avec l’Afrique est celui de la vente d’armes. Sur ce point, la Turquie est réputée pour avoir développé une technicité et une compétitivité qui ne peuvent qu’être bénéfiques au continent africain où les défis et les enjeux sécuritaires sont considérables. 

Qu’il s’agisse du terrorisme islamiste qui ne cesse de gagner du terrain et de nombreuses autres menaces auxquelles sont confrontés des Etats sur un continent où l’industrie de l’armement est quasi inexistante. C’est une tendance que confirme une étude récente de l’Observatoire de la Turquie et de son environnement géopolitique de l’Institut des Relations Internationales et Stratégiques (IRIS) : « En plus, pour la Turquie qui a l’ambition de s’affirmer sur le marché mondial des ventes d’armes, notamment par ses drones qui se sont imposés lors des guerres au Haut-Karabakh, en Ukraine, en Libye et en Syrie, le continent africain se présente comme une opportunité pour exporter son savoir-faire militaire. De nombreux pays africains achètent en effet du matériel de défense turc. Du point de vue africain, les armes turques sont bon marché et permettent de réduire leur dépendance par rapport aux puissances occidentales qui sont économiquement et politiquement plus exigeantes ».

Autre atout de la Turquie dans cette coopération militaire avec l’Afrique, c’est qu’elle n’est regardante ni sur l’usage que feront les gouvernements de ces armes, ni sur les droits humains.

Enfin, la Turquie, comme toute puissance aux horizons toujours plus vastes, a joint à son arc diplomatique une dimension du soft power, notamment dans les domaines de l’éducation, de la formation dans des métiers de pointe en médecine ou divers types d’ingénierie, tout comme dans le domaine religieux.

La coopération entre l’Afrique et la Turquie est incontestablement sur une dynamique ascendante dont les perspectives demeurent prometteuses. Du moins, c’est ce que croient la plupart des pays du continent et leur partenaire turc dans un dynamique d’un partenariat gagnant-gagnant.

 

 

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